A l’heure du renouveau des enquêtes de satisfaction client, les émotions et les ressentis du client viennent bouleverser les certitudes des responsables marketing. Durant de longues années, l’approche marketing visait exclusivement à évaluer la part rationnelle d’une interaction client/entreprise, au sens large ou sur un point de contact précis. Désormais, cette approche doit s’enrichir de l’analyse des émotions et des ressentis pour mieux comprendre les clients et mieux adapter sa stratégie de fidélisation.
Plusieurs études viennent corroborer ces faits. En 2017, une étude menée par Aude Rychalski et Sarah Hudson et publiée dans le Journal of Business Research démontrait avec force l’impact des émotions ressenties par les clients dans le cadre d’un service utilitaire, comme une banque en ligne par exemple. Pendant longtemps, l’aspect émotionnel s’était limité au plaisir, effectivement peu pertinent à l’heure de mesurer la satisfaction client ou d’envisager sa fidélisation. De fait, l’impact de l’émotion dans le contexte d’un commerce en ligne avait été très relativisé. Mais il apparaît que des émotions comme la joie ou le soulagement s’avèrent très importantes dans le cadre des services en ligne. L’impact de l’émotion positive sur la satisfaction client et par extension sur sa fidélisation devient prépondérant.
Une autre étude plus récente réalisée en 2018, démontre le lien effectif entre la satisfaction client et les émotions dans le cadre d’une acquisition d’un bien immobilier en VEFA (achat sur plan). Des chercheurs des universités de Paris-Dauphine et du Havre ont en effet prouvé que la satisfaction ne dépendait pas exclusivement de critères rationnels.
L’étude effectuée sur 3 ans (de la commande à la livraison) et menée sur 5 investisseurs et 7 acquéreurs au titre de la résidence principale a démontré l’importance des émotions vécues par les acquéreurs tout au long du processus. Processus découpé en 8 phases distinctes et appelées à être commentées par un mot ou un groupe de mots. Au final, alors que le promoteur immobilier analysait le parcours client sur des bases rationnelles, cognitives, analytiques, les clients, eux, vivaient des émotions au travers de leurs expériences respectives et des interactions sociales. En bref, les chercheurs ont pu mettre en évidence le lien entre satisfaction et émotions ressenties en mettant en parallèle différentes courbes de niveaux de satisfaction et d’intensités émotionnelles. Toutefois, l’émotion en elle-même est moins génératrice d’un niveau de satisfaction que l’intensité de l’émotion vécue. En résumé, plus l’émotion est forte, plus elle impacte la satisfaction client.
Ces exemples récents viennent confirmer les recherches sur le sujet menées par Audirep en 2016-2017 au cours d’une étude exploratoire qualitative puis quantitative auprès d’un échantillon représentatif de 1000 personnes.
En effet, l’étude démontrait que la satisfaction est avant tout un sentiment, une émotion vécue par l’individu. La satisfaction est générée par l’accomplissement ou non d’un objectif à atteindre. Elle correspond à un état émotionnel à un moment donné, occasionné par le dénouement d’une tension créée par l’objectif recherché (avoir gain de cause, être bien reçu, voir une erreur corrigée, bénéficier d’une offre tarifaire favorable, …).
Les différentes émotions, au-delà de la joie et de son effet immédiat, se matérialisent par une large palette beaucoup plus subtile qui intègre par exemple :
l’apaisement si le client était passé au préalable par une phase de tension,
la confiance, condition d’une relation pérenne entre le client et l’entreprise
la reconnaissance notamment si le client a le sentiment que l’Entreprise a fait un effort pour le satisfaire (sentiment décuplé si l’effort fait par l’entreprise est jugé supérieur à celui que le client à fait lui-même).
Mais attention, la satisfaction est fragile, car en tant qu’état émotionnel, elle est puissante mais pas forcément pérenne. Elle peut d’avérer volatile. Pour qu’elle dure il faut répéter les événements sources de satisfaction, c’est-à-dire renouveler l’état émotionnel qui la caractérise.
L’objectif de ces recherches était d’apporter un nouveau regard sur les indicateurs couramment utilisés dans les études de satisfaction, en cherchant à être aussi fidèle que possible à la restitution et la compréhension des expériences des clients. L’étude a ainsi permis de créer des indicateurs complémentaires novateurs venant enrichir les mesures traditionnelles (satisfaction, NPS, fidélité …) et permettant de mieux capter les émotions, en introduisant par exemple des notions comme la trace mémorielle, le double score d’effort ou encore la confiance.